Le dernier numéro de Bifrost est consacré à James Tiptree Jr., autrice américaine plutôt méconnue en France, dont la bibliographie comporte trois romans et une cinquantaine de nouvelles écrites entre 1967 et 1987. Jusqu'en 1977, le grand public ne savait pas que derrière le pseudonyme de James Tiptree Jr. se cachait en réalité une femme du nom d'Alice Sheldon.
L'édito d'Olivier Girard est consacré à nos genres de prédilection et leurs apparitions plus que récurrentes dans la littérature blanche. S'ensuivent quatre nouvelles signées Jean-Claude Dunyach, Ian R. MacLeod, Thomas Day et James Tiptree Jr.
- Les objets savent... - Jean-Claude Dunyach
Jean-Claude Dunyach, auteur d'une petite dizaine de romans, fait partie du paysage imaginaire français depuis une quarantaine d'années. Il est surtout un novelliste renommé avec pas loin d'une centaine de nouvelles à son actif. Les objets savent... étant son dernier texte publié (et ma première lecture de l'auteur !)
Avec Les objets savent..., Jean-Claude Dunyach nous plonge au coeur de la pensée des IA et plus particulièrement de celle d'un ex-véhicule militaire reconverti en taxi qui utilise ses capacités cognitives et les objets connectés autour de lui pour résoudre un meurtre.
Ce texte est un petit bijou qui humanise l'IA, lui donnant le pouvoir de s'ennuyer, de s'amuser et de réfléchir indépendamment des demandes humaines. Allant même jusqu'à diriger les humains dans leurs prises de décisions, l'auteur fait de l'homme une marionnette des IA ou de l'IA un Dieu invisible de l'humanité. Ambigu, troublant et excellent.
- Le Chronologue - Ian R. MacLeod
Ian R. MacLeod est un auteur écossais dont les écrits sont plutôt rares mais souvent repris au Bélial. L'une de ses dernières parutions Le Chronologue s'attarde comme son titre l'indique sur le temps qui passe. Dans une ambiance fantasy, un chronologue passe remettre à l'heure les horloges, carillons et autres appareils mesurant le temps d'une petite cité recluse.
Dans cette nouvelle divisée en quatre chapitres représentant quatre saisons, on suit le chronologue dans ses affaires et un petit garçon curieux qui épie voire espionne ce maitre horloger. D'une facture très classique, ce texte est un petit bonbon fort agréable mais sans surprenante saveur.
- Un après-midi à l'@rboretum de Reykjavik - Thomas Day
Thomas Day, figure indissociable du Bélial, est probablement l'auteur le plus publié au sein de la revue Bifrost. Il revient dans ce numéro avec un texte très court : Un après-midi à l'@rboretum de Reykjavik.
Difficile de parler de cette nouvelle sans déflorer son contenu et en faire perdre l'intérêt. Un court texte amer qui parle à la fois de fossé générationnel et de la possibilité de vivre différemment quand la conscience prend de nouvelles formes.
- Ces femmes que les hommes ne voient pas - James Tiptree Jr.
Avec Ces femmes que les hommes ne voient pas, James Tiptree Jr. prend le contre-pied de la vision paternaliste et misogyne du monde. Elle nous narre les réactions d'un homme, notre narrateur, face au comportement d'une femme et de sa fille qui ne réagissent pas comme "cela devrait". Ce texte, aussi poétique que féministe, a ce charme suranné d'une époque qui ne l'est pas. C'est bien écrit, c'est beau mais je ne suis pas pleinement convaincu.
Puis vient le cahier des critiques dont je partage nombre d'avis, que ce soit la faiblesse des romans de Louise Carey ou Mary Robinette Kowal, un réel enthousiasme autour de la trilogie de La Transparence de Benjamin Fogel, la qualité toujours égale de Laurent Genefort ou la réussite majeure de La Maison des Soleils. Ces recensions m'ont conforté dans mon choix de ne pas lire le dernier Scalzi mais de plutôt m'intéresser à celui de Naomi Alderman.
On retrouve avec plaisir les rubriques habituelles : Paroles... de Libraire avec Eva Sinamian qui officie chez Les mots à la bouche, Antho à gogos qui revient sur les 50 ans du GPI avec Architecte du Vertige, Scientifiction où le Professeur Lehoucq s'adjoint les services de Fabrice Chemla que l'on retrouvera prochainement chez Parallaxe pour parler Chimie et SF.
Sans oublier le dossier James Tiptree Jr, autrice que j'ai découvert il y a quelques mois grâce à la collection Une-Heure-Lumière et sa novella Houston, Houston, me recevez-vous ? Ce n'est pas forcément ce genre de dossier qui m'intéresse le plus, mais celui-ci est touchant, intéressant par ce côté autres temps, autres mœurs (enfin espérons que cela soit du passé, que cela soit dépassé). A découvrir comme une "petite" histoire de la SF.
Le rendez-vous est pris pour le prochain numéro qui sera consacré à une autre grande dame de l'Imaginaire : Catherine Dufour.
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