Bouleversant
Leila Mottley est une jeune autrice américaine dont le premier livre Arpenter la nuit, écrit alors qu'elle n'avait que dix-sept ans, est inspiré d'un fait divers réel qui a secoué la ville d'Oakland en 2015.
Avec Arpenter la nuit, on suit Kiara, une adolescente afro-américiane à l'aube de sa majorité qui se démène pour payer son loyer et subvenir à ses besoins. Depuis la mort de son père et l'emprisonnement de sa mère, elle vit seule avec son frère Marcus dans un quartier déshérité d'Oakland en Californie. Son grand frère rêve de devenir un rappeur célèbre comme son oncle Ty, passant son temps dans les studios d'enregistrement alors qu'elle va de petits boulots en galère pour survivre. L'augmentation du loyer et la peur de perdre son appartement ainsi qu'un concours de circonstances malheureux pousse l'adolescente vers l'argent "facile"... s'en suit une lente descente aux enfers.
Dans Arpenter la nuit, l'autrice brosse le portrait d'une ville où il n'est pas bon être une jeune fille, noire et pauvre. Elle dénonce l'exploitation sexuelle de ces adolescentes, la misère et le peu d'espoir de toute une frange de la population. Sur fond de corruption, de racisme et de trafic de drogue, Leila Mottley arrive tout de même à nous proposer un livre lumineux. Derrière la détresse et la peur, chaque petit bonheur, chaque moment de tendresse ou d'amour est décuplé, offrant une raison d'exister.
Récit sombre, Arpenter la nuit est bouleversant du début à la fin. Il est impossible de ne pas s'identifier à cette gamine impuissante face à ce qu'il lui arrive, faisant d'elle une spectatrice de sa propre vie. Mais c'est aussi un roman engagé, militant, qui brosse le portrait d'une Amérique à plusieurs vitesses où la population noire sera toujours reléguée au second rang.
On ne peut s'empêcher de faire un parallèle avec l'œuvre de Colson Whitehead qui détaille la longue et difficile histoire des noirs américains avec justesse, que ce soit dans Underground Railroad au coeur des champs de coton au milieu du XIXème siècle ou dans Nickel Boys dans la Floride ségrégationniste des années 1960. Leila Mottley, quant à elle, évoque sans complaisance mais avec pudeur l'effondrement progressif d'une jeune fille délaissée par le système et à travers elle les désillusions d'une partie de la population afro-américaine d'aujourd'hui. Elle dépeint ce quotidien avec pertinence et maturité, laissant entrevoir de maigres espoirs.
J’avais déjà lu Colson Whitehead et apprécié.
RépondreSupprimerJe note celui-là que j’avais croisé et qui m’avait intrigué par sa couverture.
Arnaud
C'est dans la même veine que Colson Whittehead... c'est une lecture qui marque.
SupprimerJe note évidemment - Terres d'Amérique Rules - merci pour la découverte.
RépondreSupprimerTu ne peux qu'apprécier cette lecture. Et, oui, cette collection est vraiment exceptionnelle, je trouve !
SupprimerJe rajouterai” La douceur de l’eau” de Nathan Harris,un peu dans la même veine.
RépondreSupprimerArnaud.
Je ne connais pas du tout, je vais aller jeter un oeil. Merci
Supprimer