Une douce lueur de malveillance - Dan Chaon

Exploration de la folie

C'est sur les recommandations de Just a Word que j'ai délaissé, pour un temps, les sphères de l'imaginaire et décidé de m'attaquer à ce roman ambigu entre thriller, polar et roman psychologique. Dan Chaon nous plonge ici dans les eaux troubles de la folie, de l’obsession et de la mémoire.

Une douce lueur de malveillance est un roman atypique, complètement déstructuré, aussi bien sur la forme que sur le fond. L'écriture est vraiment particulière, de nombreuses phrases interrompues, des blancs essaimés ici et là, quelques échanges sms et un texte qui parfois se scinde en plusieurs colonnes. Cela est assez déroutant mais parfaitement cohérent avec le récit.

Pour ajouter à la sensation de désordre, l'auteur entremêle la trame chronologique. Fin des années 70, début des années 80, période où nous est décrit l'enfance difficile de Dustin Tillman, le meurtre de ses parents, oncle et tante, avec en toile de fond le développement des sectes sataniques. Début des années 2010, ce même Dustin est devenu psychologue, sa femme développe un cancer, ses enfants partent à la dérive, en particulier Aaron un véritable junkie. Aquil, l'un de ses patients et ancien flic, pense que les noyades d'un certain nombre d'étudiants sont l'oeuvre d'un serial-killer et veut entraîner Dustin dans ses recherches. Enfin Rusty, son frère adoptif accusé du quadruple homicide, est disculpé grâce à un test ADN et libéré après 30 ans de prison.

Les chapitres alternent entre ces deux périodes, agrémentés de nombreux flash-back, chacun distillant des éléments nouveaux non pas dans la résolution de l'homicide mais dans la psychologie des différents personnages. Et c'est au bas mot, une dizaine de personnages qui sont croqués avec minutie par Dan Chaon. Tous torturés, ils apportent chacun leur(s) psychose(s) à l'histoire et leurs vérités. Jusqu'à la dernière page (et même après) un certain flou persistera.

Une douce lueur de malveillance est un immense travail sur la mémoire, les souvenirs et la "réalité" mais aussi une exploration de la folie et de l'obsession. L'auteur nous promène de révélation en révélation. A nous de faire le tri, d'essayer de comprendre ce qui s'est réellement passé le jour du meurtre. Mais le roman est avant tout une plongée dans les ténèbres d'un homme, une description de sa lente descente aux enfers et des répercussions sur sa famille et ses amis.

Glaçant, perturbant Une douce lueur de malveillance est d'une efficacité effroyable. Difficile de se détacher du livre même une fois celui-ci reposé. Il questionne sur notre relation aux événements passés et à la signification qu'on veut bien leur donner. Surement l'un des livres les plus noirs, les plus sombres de ces dernières années.


Commentaires

  1. Merci je note pour vérifier si on l'a à la bib !

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  2. J'en avais déjà entendu le plus grand bien. Je vais y venir, je pense.

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    1. C'est vraiment un roman particulier. A découvrir. J'attends donc ton retour.

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  3. Si l'imprimeur - désormais viré - qui a mélangé les feuillets savait que tout le monde trouve ça génial et pense que c'est volontaire... =P

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  4. Ok, ok,ok.
    je prends une respiration.

    le tableau que tu brosse est non seulement dramatique mais désespérant. Je me demande quelle est l'ambiance, la sensation que tu as eu à la lecture. Cra franchement, cela n'a pas l'air d'être follichon. EN soi, ce n'est pas un point négatif, mais si c'est pesant, cela fait une différence.
    Je n'ai pas envie de choses pseantes lourdes, ect.... sinon, je regarde la réalité.

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    1. Je me suis demandé longtemps quel était le but ultime. Mais j'ai été pris dans la "folie" de l'auteur et je voulais comprendre.
      Les thèmes abordées ne sont pas joyeux (homicides, maladie, folie, dépression...) donc forcement ce n'est pas la joie, mais ce n'est pas pesant (enfin si, mais ca passe !)
      Et le cheminement est super intéressant et ca fait réfléchir à nos actes et à la signification que l'on veut bien leur donner.

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  5. Réponses
    1. Pourtant ici ce n'est pas une histoire de bisounours...

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