La Cité des nuages et des oiseaux - Anthony Doerr

Les livres, symboles de puissance et de fragilité

La Cité des nuages et des oiseaux d'Anthony Doerr, encensé par la critique comme par la majorité des lecteurs, a été publié l'an dernier dans la collection Terres d'Amérique chez Albin Michel. Roman choral sur trois époques autour de cinq personnages avec comme fil conducteur un récit antique qui traverse les temps, qui relie les histoires entres elles et alimente chacune des vingt quatre parties de ce petit pavé de presque sept cents pages.

A la fois roman historique où l'on découvre la chute de l'empire byzantin au XVème siècle, avec d'un côté Anna une jeune brodeuse habitant Constantinople et de l'autre Omeir, un jeune garçon en partie défiguré qui se verra enrôlé dans l'armée du sultan Mehmet II, La Cité des nuages et des oiseaux est également un roman contemporain où l'on suivra Zeno, des années 50 à aujourd'hui, de la guerre de Corée à la préparation d'une pièce de théâtre, qui croisera Seymour un jeune garçon s'apprêtant à commettre l'irréparable. Mais c'est aussi un roman de SF post-apocalyptique, où Konstance vit seule, cloitrée dans la capsule d'un vaisseau spatial, fuyant la Terre dévastée en direction d'une planète lointaine avec comme seule compagne Sybil une IA omnisciente et protectrice.

Ce livre à la narration éclatée, passant d'une époque à l'autre, d'un personnage à l'autre, malmenant la chronologie, oubliant la linéarité du temps, requiert un minimum d'attention... heureusement, en tête de chaque chapitre, date et lieu sont mentionnés. La Cité des nuages et des oiseaux est donc plutôt déroutant au premier abord. En effet, quel lien peut-il y avoir entre la petite fille aux chaussettes trouées enfermée dans une capsule spatiale du premier chapitre, le vieux monsieur répétant une pièce de théâtre avec des gamins dans une salle de bibliothèque en 2020, et cette jeune byzantine curieuse et espiègle assistant à la disparition de son empire ? Ce fameux récit antique auquel chacun des protagonistes fait plus ou moins référence ! 

Quelques chapitres sont nécessaires pour nouer entre eux les fils des différentes histoires, et bien plus pour comprendre les tenants et les aboutissants mais lecture ce faisant, Anthony Doerr nous happe dans ses récits entremêlés où rien n'est laissé au hasard. Même si le premier tiers peut paraître, lent, abscons (mais jamais ennuyeux, la plume de l'auteur étant merveilleuse), il ne faut pas baisser les bras ou abandonner espoir, bien au contraire, la lumière se fera tout doucement pour finir en apothéose quand tout s'imbriquera parfaitement. 

La Cité des nuages et des oiseaux est un immense roman, une pure merveille de construction narrative, une ode aux livres et à ceux et celles qui en prennent soin. A travers un récit antique qui traverse les temps, symbole de la puissance et de la fragilité des livres, objets de transmission du savoir, d'ouverture d'esprit, d'espoir et de liberté, symboles du temps qui passe, de notre propre grandeur et de notre déchéance, Anthony Doerr nous parle de la vie, de la fragilité de notre monde, et de tant d'autres choses encore... 


Commentaires

  1. Ah! déjà quand tu expliquais qu'il s'agit là d'un roman avec une assise historique et pas n'importe laquelle, Istanbul, j'étais ferrée, et avec ta conclusion, tu as pris le poisson. Et puis le titre.
    Bon, "chéri?! je veux un livre." Encore ? lequel cette fois ?"

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  2. Direct dans la wish list. Après un avis comme celui-ci, je suis évidemment hyper tentée par cette lecture qui me faisait déjà de l'oeil auparavant. La qualité de la plume, l'ode aux livres, la construction narrative originale... c'est très alléchant

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    1. C'est un livre exigeant mais ô combien passionnant. A découvrir et à faire découvrir.

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  3. J'ai tellement hâte de le lire. Et je ne suis même stressé : je sais que je vais adorer. Terres d'Amérique Rules ! ^^

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    1. On est rarement déçu par cette collection. Tu peux y aller les yeux fermés et si j'ajoute que c'est dans la lignée de David Mitchell... ?!

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  4. Et ”Toute la lumière que nous ne pouvons voir”,est aussi bon

    Oui il ne faut pas hésiter à poursuivre la lecture.
    Arnaud

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    1. Le bon livre au bon moment, parfois ca ne matche pas du départ pour de mauvaises raisons, c'est pour cela que je laisse toujours une deuxième chance.
      Je regarderai les autres écrits de l'auteur.

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  5. Il est dans mes repérages depuis un moment celui-là, merci du rappel !

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    1. De rien, ne te reste plus qu'à le lire maintenant !

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  6. Belle chronique qui donne envie de lire le roman^^

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  7. Je l'ai trouvé très facile à lire malgré la navigation entre les époques.

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    1. Ce n'est pas difficile, il faut juste être attentif. ;-)

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  8. Il faut que je le lise, ton avis me le confirme ^^

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    1. Ca ne peut que te plaire, il y a le petit côté David Mitchell qui il me semble te convient bien.

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