Analog / Virtuel - Lavanya Lakshminarayan

Dystopie méritocratique

Les éditions Hachette se (re)lancent elles aussi dans les mauvais genres avec une nouvelle collection Le Rayon Imaginaire. Après la réédition du classique de Mary ShelleyFrankenstein, un inédit de Robert Henlein, Destinations Outreterres et le bestseller d’Alix Harrow, Les Dix Mille Portes de January, elles nous proposent Analog/Virtuel, l'œuvre d’une game-designer indienne Lavanya Lakshminarayan qui, pour son premier roman a été finaliste du prestigieux prix Locus.

Analog/Virtuel est un fixup c’est-à-dire que le livre regroupe un ensemble de textes se déroulant dans un même univers. La vingtaine de nouvelles composant ce recueil s’interconnectent entre elles par les personnages et les évènements pour former une trame continue et cohérente. De longueur variable, de quelques pages à rarement plus de quarante, ces histoires nous présentent des tranches de vie des habitants de la ville futuriste d’Apex City construite sur les ruines de la cité indienne de Bangalore.

Analog/Virtuel est une dystopie méritocratique, la société est basée sur la productivité et les bienfaits que chacun apporte à ce monde technocratique dirigé par un puissant consortium privé Bell Corporation, faisant de vous un Analog ou un Virtuel. Les Analogs, considérés comme les rebuts, les improductifs du système, représentent les Dix pour Cent de la population, ils vivent en marge de la société, ils en sont exclus, ils vivent d’ailleurs hors du périmètre technologique et sécurisé d’Apex City. La majeure partie de la population, classe moyenne qui ne rêve que de s’élever et a peur d’être rétrogradée comme Analog, fait partie des Soixante-dix pour Cent. Les Vingt pour Cent supérieurs sont les influenceurs mais restent très dépendants de la caste des Un pour Cent, les plus riches qui dirigent la mégalopole. A eux tous ils forment les Virtuels, ils sont constamment branchés sur les réseaux et sont submergés de technologies high tech, de biopuce aux implants…

L’autrice dénonce à travers ces petites histoires du quotidien la mainmise des firmes capitalistes sur le monde, l’asservissement du peuple sur l’autel de la productivité. Analog/Virtuel est aussi une critique acerbe des réseaux sociaux, de l'apparence, de l’égoïsme et de l’individualisme de nos sociétés de consommation. Mais elle montre également la force de l’humain qui chacun à son niveau essaye parfois de se rebeller contre le système, la résistance comme trame de fond avec l’espoir de jours meilleurs.

Analog/Virtuel n’est pas révolutionnaire sur le fond, il reste très classique dans le genre dystopie cyberpunk. Il n’en est pas moins une lecture plus que recommandable. Lavanya Lakshminarayan offre de l’originalité sur la forme, ses multiples histoires créent un univers riche, dense et humain, tout en amenant une réflexion intéressante sur le monde de demain, d’aujourd’hui. Une réussite pour un premier roman, espérons que d’autres suivront et que l’autrice continuera de développer son univers.


Commentaires

  1. Ah, un fix-up ! C'est ça qu'ils auraient dû mettre sur le bandeau, ça c'est vendeur.

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    1. A quand une étude sur l'impact des bandeaux rouges sur les ventes.

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  2. En PAL, je me réjouis de le lire !

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  3. Oh ça a l'air intéressant, et on n'a pas souvent des textes d'Inde... Bon je sais pas quand je le lirais mais je note, un jour ^^

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    1. C'est ma première lecture indienne mais j'ai été plus dépaysé à lire Le Fleuve des Dieux de Ian McDonald. Ici c'est très classique, très anglo-saxon ;-)

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