Un polar inventif
La Manufacture de Livres a lancé le mois dernier une nouvelle collection : La Manuf. Une collection de romans noirs où l'on peut croiser des voyous, des espions, des politiques ou des mafieux, et qui a pour but de revisiter les codes du genre avec des histoires explosives et des personnages incisifs. Le premier titre à paraitre était La petite fasciste, une légère uchronie politique de Jérôme Leroy, le deuxième La Dernière Etape de Guillaume Guéraud, un polar noir, inventif dans sa construction.
La Dernière Etape est le nom d'un rade paumé au fin fond d'une campagne dans le Sud de la France, un bouge qui ne voit passer que quelques rares touristes et guère plus de routiers venant se rafraichir ou grignoter un morceau. La Dernière Etape c'est aussi le point de chute de Melvin Miller qui après trois ans au violon retrouve ses fourneaux et sa "pute", mais il le sait bien, son retour au bercail signifie sa mort prochaine. Son ex-associé, Kazimir, veut se venger et rien ne l'arrêtera, pas même les deux flics en planque dans ce troquet perdu venus l'alpaguer. La Dernière Etape est un lieu semi-désertique accablé par la chaleur avec une clim en perdition, le centre d'un règlement de comptes qui verra éclater en moins de trois minutes quinze coups de feu provenant de huit armes différentes faisant un carnage parmi la "clientèle", bien loin du scénario attendu, car même si tout était écrit d'avance, rien ne se passe jamais comme prévu.
Le principal atout de ce court roman est sa construction narrative. Chaque chapitre commence par le cheminement d'une des balles, de l'arme à sa future victime. S'ensuit une rétrospective des dernières heures de celle-ci, esquissant les contours d'une histoire plus globale. Le tout entrecoupé des pensées d'un narrateur anonyme qui philosophe sur sa vie, sur la vie. A chaque chapitre, la narration s'enrichit, faisant vivre et revivre indéfiniment la même scène mais d'un point de vue différent, une variation originale "d'un jour sans fin" où l'auteur s'amuse à ajouter à chaque fois une arme, un tir, une (ou plusieurs) balles et quasiment autant de victimes...
Guillaume Guéraud nous propose, sous une pointe d'humour féroce, un récit original, inventif et addictif. Aussi vif que percutant, La Dernière Etape sort des sentiers battus, rebat les cartes des romans noirs et se dévore d'une traite. Une véritable réussite.
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