La transparence selon Irina - Benjamin Fogel

La fin de l'anonymat

Les collections noires regorgent de récits dystopiques ou d'anticipation (n'ayons pas peur des mots de science-fiction) qu'il n'est pas toujours facile d'identifier. La collection Rivages Noir n'échappe pas à la règle. C'est le cas du roman de Benjamin Fogel, La Transparence selon Irina, publié en 2019 dont j'ai découvert l'existence en apprenant la publication le mois prochain du troisième volet de la série : L'absence selon Camille.

La Transparence selon Irina est un livre transgenre qui navigue entre le thriller, l'anticipation, la dystopie et le polar mais dont le thème principal tourne autour de l'Internet, pardon du "Réseau" qui l'a remplacé et qui a mis fin à l'anonymat dans le monde virtuel, toutes les données bancaires, sociales, juridiques, médicales étant en libre accès pour tous. Par contre, il est possible de se créer un pseudonyme dans la vie réelle pour que les personnes que vous côtoyez tous les jours ou occasionnellement ne viennent briser votre intimité ou vous épier dans le monde virtuel. Ce sont les "nonymes", qui s'opposent aux "rienacas" qui eux veulent une transparence totale que ce soit dans le monde réel ou dans le monde virtuel, quand d'autres, les "nonistes" ont coupé tout contact avec le Réseau et vivent en marge de la société. Parmi eux se retrouve une frange des "Obscuranets", terroristes insaisissables qui veulent mettre fin au système en place.

Camille Lavigne, très active sur le Réseau, gravite dans la sphère d'une influenceuse Irina Loubovsky, une brillante intellectuelle très clivante qui fait un peu la pluie et le beau temps sur la toile. Camille cherche à en savoir un peu plus sur son modèle, quitte à franchir les lignes rouges du monde de demain...

La narration est un peu décousue, à croire que Benjamin Fogel n'a pas su comment orienter son récit. La mise en place de son univers quoique précise est un peu lente avant que l'histoire tourne au polar puis se recentre sur la vie de Camille pour finir en apothéose. De nombreuses notes de bas de pages émaillent le début du roman coupant le rythme de lecture. Notes qui n'apportent peu à l'histoire hormis quelques explications que l'auteur amène très bien par ailleurs dans son récit.

Cependant Benjamin Fogel dépeint une société future très proche de la nôtre et vers laquelle nous pourrions tendre. Il dresse un portrait sans faille de citoyens avides d'informations et de données, où les réseaux sociaux restent leur seul espace de communication, de détente, de travail et de plaisir et où le privatif n'a plus lieu d'être. Sans jamais tomber dans le manichéisme primaire, il explicite à renfort de pensées de grands philosophes les thématiques mises en jeu, arguant tout et son contraire pour pousser le lecteur dans ses retranchements et l'amener à réfléchir sur nos sociétés en devenir, sur l'utilisation des réseaux sociaux et sur l'intelligence artificielle.

Derrière quelques défauts mineurs, La transparence selon Irina reste un roman aussi recommandable que passionnant et je vais m'empresser de lire le second volet : Le silence selon Manon.


Commentaires

  1. Je l'avais bien aimé aussi celui-là. Mais je n'ai pas attaqué le deuxième. J'attends ton retour avant de l'envisager.

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  2. pas l'habitude du tout de ce genre hybride donc... mais pourquoi pas!?

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    1. Une dystopie autour de Réseaux Sociaux et de leurs évolutions avec en prime l'arrivée de l'IA. Des thèmes classiques mais une approche originale qui est à découvrir. ;-)

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